Caducité de la déclaration d’appel. Et après ?
Je le pressentais depuis de longs mois, et avais eu l’occasion de l’écrire, sur ce blog et ailleurs, et de le dire, et dernièrement encore devant des confrères avocats, dans le cadre du séminaire de Morzine.
Je croyais d’ailleurs l’avoir décelé dans les derniers arrêts de la Cour de cassation, qui parlait de caducité de l’appel, et non de caducité de la déclaration d’appel.
Il était donc certain pour moi que la Cour de cassation ne permettrait pas à un appelant de refaire un appel en cas de caducité de son premier acte.
Bingo !
Par un arrêt du 21 janvier 2016 (Civ. 2e, 21 janvier 2016, n° 14-18631, Publié au bulletin), évidemment publié, et certainement promis à de larges commentaires, la Cour de cassation – alignant la position de l’appelant sur celle de l’intimé – confirme que l’appelant sanctionné par une caducité ne peut refaire régulièrement un appel :
“Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de confirmer l’ordonnance ayant déclaré caduque sa déclaration d’appel tout en précisant que la seule déclaration d’appel à prendre en considération pour calculer le délai imparti par l’article 908 du code de procédure civile était celle du 13 janvier 2012, la seconde déclaration d’appel étant de nul effet, alors, selon le moyen, qu’en application de l’article 908 du code de procédure civile, la sanction du non-dépôt des conclusions d’appel dans le délai est uniquement la caducité de la procédure concernée ; que la jonction des instances ne créant pas une procédure unique, chacune des instances conserve sa propre autonomie de sorte que la caducité affectant l’une d’elles n’affecte pas l’autre ; que l’appelant qui a déposé deux déclarations d’appel successives peut abandonner la première déclaration qui devient ainsi caduque et ne conclure que pour la seconde, alors que la jonction des deux appels a été prononcée ; que dès lors que le second appel a été fait dans le délai, la caducité affectant la première déclaration n’affecte pas la seconde ; qu’en l’espèce, M. X… a fait appel d’un jugement par une première déclaration électronique du 13 janvier 2012 ; qu’en raison de l’incertitude qu’il avait de la recevabilité de cet appel il a formalisé un second appel par déclaration électronique du 25 janvier 2012 ; que la jonction des procédures ayant été ordonnée le 9 février 2012, M. X… a déposé ses conclusions d’appelant le 25 avril 2012 ; que les écritures ont donc été déposées dans le délai de sa seconde déclaration d’appel du 25 janvier 2012, de sorte que la caducité affectant la première déclaration d’appel ne pouvait avoir pour résultat de rendre de nul effet la seconde déclaration d’appel ; qu’en jugeant le contraire la cour d’appel n’a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qui s’imposaient en violation des articles 368, 954 et 908 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu’ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que la déclaration d’appel du 13 janvier 2012 contenait les mentions prescrites par l’article 901 du code de procédure civile dans sa version alors applicable, et exactement retenu que la seconde déclaration d’appel identique à la première comme ayant été formée à l’encontre du même jugement et désignant le même intimé, était privée d’effet dès lors que la précédente déclaration était régulière et avait emporté inscription immédiate de l’affaire au rôle, l’appelant étant tenu de conclure dans le délai de trois mois à compter de celle-ci sous peine de caducité de la déclaration d’appel, la cour d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;“
La messe est dite.
C’est confirmé, la procédure d’appel est vraiment très compliquée, et l’avocat qui est le représentant en appel travaille sans filet, et sans possibilité de revenir en deuxième semaine s’il échoue la première fois.
Quitte à commettre une erreur, l’appelant a tout intérêt à ce que la sanction de son acte soit l’irrecevabilité, voire, mieux, la nullité, au regard de la jurisprudence sur l’article 2241 du Code civil.
Cette jurisprudence devance le décret de procédure à venir qui, on le devine, pourrait ratifier cette jurisprudence…
