Confirmation ou caducité : c’est comme vous voulez !

21 septembre 2023
Procédure d'appel

On sent un air de « déjà-lu » dans cet arrêt de cassation qui n’est pas voué à être publié (Cass. 2e civ., 30 sept. 2021, n° 20-15.674) :

« Vu les articles 542 et 954 du code de procédure civile et 6,§1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :
5. Il résulte des deux premiers de ces textes que l’appelant doit dans le dispositif de ses conclusions mentionner qu’il demande l’infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l’anéantissement, ou l’annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue à l’article 914 du code de procédure civile de relever d’office la caducité de l’appel. Lorsque l’incident est soulevé par une partie, ou relevé d’office par le conseiller de la mise en état, ce dernier, ou le cas échéant, la cour d’appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d’appel si les conditions sont réunies.
6. Cette règle, qui instaure une charge procédurale nouvelle pour les parties à la procédure d’appel ayant été affirmée par la Cour de cassation le 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626 publié) pour la première fois dans un arrêt publié, son application immédiate dans les instances introduites par une déclaration d’ appel antérieure à la date de cet arrêt, aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable.
7. Pour déclarer caduque la déclaration d’appel de Mme [H], l’arrêt retient, d’une part, que l’article 542 du code de procédure civile précise que l’appel tend, par la critique du jugement rendu, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel, d’autre part, que le fait que la déclaration d‘appel soit conforme aux prescriptions formelles, imposées à peine de nullité par l’article 901 du code de procédure civile, ne dispense pas l’appelant de remettre des conclusions qui déterminent l’objet du litige.
8. L’arrêt constate, ensuite, que le dispositif qui, aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, récapitule les prétentions ne comporte aucune demande d’annulation, de réformation, d’infirmation totale ou partielle ou de confirmation partielle du jugement rendu en premier ressort et ajoute, enfin, que les mentions portées dans la discussion des prétentions et des moyens ne sauraient suppléer l’absence d’une partie des prétentions dans le dispositif devant les récapituler.
9. En statuant ainsi, la cour d’appel a donné une portée aux articles 542 et 954 du code de procédure civile qui, pour être conforme à l’état du droit applicable depuis le 17 septembre 2020, n’était pas prévisible pour les parties à la date à laquelle elles ont relevé appel, soit le 11 février 2019, une telle portée résultant de l’interprétation nouvelle de dispositions au regard de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l’application de cette règle de procédure, instaurant une charge procédurale nouvelle, dans l’instance en cours, aboutissant à priver Mme [H] d’un procès équitable au sens de l’article 6,§1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 6 mars 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;
»

Il présent pourtant un point qui m’interpelle, et qui me semble assez nouveau.

Il fait le lien entre les deux ères à savoir l’avant et l’après 17 septembre 2020.

  • Avant le 17 septembre 2020

On ne sanctionne pas l’absence de demande d’infirmation ou d’annulation dans les conclusions.

En revanche, si le dispositif ne contient pas de prétentions, la caducité est encourue.

  • Depuis le 17 septembre 2020

On sanctionne l’absence de demande d’infirmation ou d’annulation dans les conclusions, par la confirmation du jugement.

En revanche, si le dispositif ne contient pas de prétentions, la caducité est encourue.

En outre, l’absence de demande d’infirmation ou d’annulation, qui est assimilé à une absence de prétention, permettrait également d’introduire un incident devant le CME en caducité.

Pour l’appelant, cela ne change pas grand chose. Qu’il se tape une confirmation ou une caducité, ça ne va pas changer sur son moral.

Mais pour l’intimé, c’est autre chose.

Il pourra dégommer l’appel sans attendre de longs mois.

Surtout, il récupère un fusil à trois cartouches :

  1. saisine du CME en caducité
  2. déféré devant la cour sur la caducité
  3. demande de confirmation devant la cour d’appel

Je sens que cet arrêt, pourtant non publié, est de nature à multiplier les incidents ?

Personnellement, je suis d’autant plus enclin à introduire un incident que cet incident devient inévitable lorsque l’appel corrige le dispositif de ses conclusions, pour y intégrer une demande qui devient irrecevable en application de l’article 910-4.